Les villes écologiques sont-elles une utopie ? Les acteurs qui visent à y introduire plus de biodiversité sont en tout cas nombreux, et regorgent d’idées. Elles visent les particuliers, mais pas uniquement. Les entreprises seraient de plus en plus nombreuses à intégrer ses enjeux environnementaux dans leur quotidien.

Sabrina Ananna, fondatrice d’aKagreen, une entreprise française spécialisée dans la végétalisation des bureaux (en intérieur comme à l’extérieur) et Maxime Dupont, directeur de projets chez Arp Astrance, un cabinet de conseil pour les métiers de l’immobilier, livrent leurs éclairages.

Une prise de conscience progressive

La prise en compte des enjeux autour de la biodiversité est venue progressivement, chez les particuliers, se traduisant par de bons gestes à mettre en place au quotidien, mais aussi chez les entreprises. “Elle s’est imposée à ces dernières à la fois à travers des certifications comme éco-jardin, défi nature ou biodiversity, et des réglementations qui se sont largement renforcées à partir de 2016, presque à chaque année depuis”, précise Maxime Dupont. “Il y a aussi de plus en plus une démarche et une approche volontaristes de la part des entreprises. Elles sont nombreuses à avoir une véritable stratégie liée à la biodiversité, à intégrer le sujet du vivant dans leur fonctionnement au quotidien.”

L’écologie serait devenue un facteur différenciant pour ces acteurs. “Même dans les reportings financiers, on a vu apparaître de plus en plus des questions autour de ces enjeux, constate le directeur de projets d’Arp Astrance. D’ailleurs, les premiers à s’être intéressés à ces questions sont les banques et les investisseurs, sous l’angle de la prise de risque. Ensuite, sont venues les grosses entreprises et les promoteurs, par effet concurrentiel : si on ne montre pas patte blanche, on peut perdre de gros contrats dans certains territoires engagés pour le climat, comme à Lyon par exemple, ou même à Paris, où la mairie a mis en place un plan local d’urbanisme avec des ambitions claires sur la question.”

Pour toutes ces raisons, Maxime Dupont estime que la planification de la biodiversité dans les bureaux est devenue “primordiale”. Reste à savoir comment y parvenir…

Partir de la sobriété, puis végétaliser les bureaux

Selon lui, la première chose à faire, dès la construction de nouveaux bureaux, est de penser le bâti sous l’angle de la sobriété : partir de l’existant, diagnostiquer, préserver des zones de pleine terre. Viennent ensuite une conception des projets adaptés au diagnostic posé, puis la troisième étape, et non des moindres, celle de la végétalisation.

Chez aKagreen, cette végétalisation commence par l’intérieur des espaces de travail. “En végétalisant les bureaux, non seulement on améliore l’esthétique et le bien-être des collaborateurs, mais on réintroduit également la biodiversité dans des environnements souvent déconnectés du vivant”, précise Sabrina Ananna.

Sa mission ne s’arrête pas là, puisque l’extérieur des bureaux est aussi à prendre en compte. “Les plantes d’intérieur proviennent, à l’origine, de l’extérieur. Il est donc inconcevable pour nous, en tant que paysagistes, de penser la végétalisation sans inclure les espaces extérieurs, poursuit la fondatrice d’aKagreen. Face aux défis écologiques actuels, la végétalisation extérieure est une nécessité pour repenser la ville de demain, renaturer les villes et s’engager en faveur d’une écologie urbaine.”

Cela passe aussi par le choix des végétaux, de préférence des plantes arbustives locales, mellifères ou persistantes, qui servent de source de nourriture, d’habitat ou de refuge à la faune. “On s’appuie beaucoup sur les concepts de ‘trame verte’ et ‘trame bleue’ pour recréer des corridors écologiques qui favorisent le maintien et le développement de la biodiversité”, complète l’experte.

Des toitures végétalisées et des cours sensibilisation à la biodiversité

Maxime Dupont ajoute que l’emplacement de ces espaces verts est aussi primordial. Vous n’êtes pas sans avoir entendu parler un jour des toitures végétalisées comme solution miracle face au manque de place en ville. Si ces toits ont un impact positif indéniable sur la gestion des eaux pluviales, sur le bien-être des employé(e)s ou sur la réduction de la température dans les bureaux, ils ne seraient pas toujours les plus intéressants en matière d’écologie. “C’est une solution qui n’est parfois pas aussi sobre qu’elle n’en a l’air, dans le sens où il faut y amener de la terre, arroser, étanchéifier”, illustre Maxime Dupont. La solution avec le meilleur bilan carbone et l’impact le plus direct sur la biodiversité serait le classique jardin au sol, et la valorisation des parcelles de pleine terre.

Et pour aller un cran plus loin dans cette démarche, aKagreen propose de sensibiliser les équipes aux enjeux liés à la biodiversité. “Nous proposons des ateliers pratiques pour apprendre à planter, tailler, et entretenir les végétaux. On intègre aussi des parcours pédagogiques avec des panneaux explicatifs qui racontent l’histoire des plantes. Cela enrichit l’expérience des collaborateurs tout en les éduquant à l’importance de la durabilité et de la préservation de la biodiversité en milieu urbain”, explique Sabrina Ananna.