ARP Astrance rode son outil de reporting sur la biodiversité

Laurent MIGUET, 18 juin 2024, publié dans Le Moniteur.

La mesure des impacts des entreprises sur la biodiversité progresse, grâce à un outil proposé par le bureau d’études ARP Astrance. Appliquée au patrimoine bâti, l’offre d’ingénierie écologique répond à l’obligation réglementaire qui découle de l’entrée en vigueur, le 1er janvier dernier, de la directive CSRD, qui oblige les sociétés à rendre compte de leurs impacts environnementaux.

Les relevés écologiques de terrain alimentent l’outil d’évaluation de la biodiversité au regard du patrimoine bâti

Tout découle du diagnostic de l’écologue. Site par site, il répertorie les espèces vivantes qui l’occupent, pour le traverser, y habiter ou s’y reproduire. Au-delà d’une réponse aux obligations réglementaires, l’auditeur ajoute trois leviers de progrès énumérés par Emma Mouheb, chargée de projets en biodiversité urbaine chez ARP Astrance : « Qualité paysagère, gestion écologique, espaces de biophilie ».

Le patrimoine au crible du vivant

L’inventaire intégrera les boisements, les zones humides ou les haies, aux abords des locaux d’activités. « Y-a-t-il une gestion raisonnée de l’eau et des éclairages », interroge Emma Mouheb ? L’écologue focalise son attention sur les zones de contact entre les travailleurs et les vivants non humains, autrement dit les espaces de biophilie. Il répertorie les espèces exotiques envahissantes, les efforts de connexion avec les espaces naturels environnants, ou les dispositifs de prévention des risques de collision des oiseaux sur les vitrages.

En aval du recueil des données de terrain, les tableurs formalisés au format Excel font ressortir les caractéristiques qui permettent la comparaison entre les sites et la mesure de leurs évolutions dans le temps. La publication annuelle de ces données répond à la directive européenne transposée dans le droit français en 2023. Directrice générale adjointe d’ARP Astrance et spécialiste des bâtiments durables, Gwenaëlle Chabroullet en rappelle la philosophie : « Les enjeux extra-financiers importent autant que les données financières, dans les rapports annuel des entreprises ».

Jungle de sigles

Les initiés désignent le texte par son sigle en anglais : la CSRD, pour Corporate Sustainable Reporting Directive. Depuis le 1er janvier dernier, la réglementation impose la communication des impacts environnementaux de certaines entreprises de plus de 500 salariés. L’obligation s’étendra en 2026 à toutes les entreprises de plus de 250 salariés ou 40 M€ de CA. La maîtrise de la réglementation impose la traversée d’une jungle d’abréviations : les stratégies en faveur de la biodiversité relèvent de la ESRS – E4.

Parmi les 12 normes européennes de reporting sur le développement durable répertoriées par la directive (en anglais : European sustainability reporting standard ou ESRS), cinq couvrent l’environnement, dont la ESRS – E4. Sa mise en œuvre repose sur le concept de double matérialité : « Il s’agit de mesurer les impacts matériels réciproques entre l’entreprise et l’environnement », décrypte Elodie Russier-Decoster, responsable d’activités en stratégie biodiversité chez ARP Astrance. La CSRD détaille six sous-chapitres à renseigner, pour se conformer à l’ESRS-E4.

Effort pédagogique

L’effort pédagogique du bureau d’études se traduit dans les notices explicatives annexées à son outil. De l’écheveau réglementaire qui pourrait renforcer les allergies aux normes, Elodie Russier-Decoster retient ce message : « L’ESRS – E4 ne se limite pas à des data points. Il faut la comprendre comme un levier d’engagements, un cadre structurant d’amélioration continue ». Parmi les perspectives ouvertes par la nouvelle réglementation, ARP Astrance cite les chantiers de renaturation que les entreprises pourraient valoriser, au titre de la comptabilité de l’artificialisation des sols.

Le contexte issu des élections européennes du 9 juin peut-il fragiliser l’ingénierie de la biodiversité au service du patrimoine bâti des entreprises ? Interrogée sur ce sujet le 10 juin lors du séminaire de présentation de l’outil d’ARP Astrance, Gwenaëlle Chabroullet répond : « Au-delà du réglementaire, il faut considérer l’opportunité pour l’image de marque de l’entreprise, et pour le bien-être des salariés et autres usagers. Nous avons créé cet outil non seulement pour répondre à la directive, mais aussi pour créer un cadre volontaire ». Un participant ajoute ce commentaire : « Elections ou pas, l’urgence demeure, pour la biodiversité comme pour le climat ».

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